mercredi 1 mars 2017

Une page d'amour - Emile Zola



Quelques infos:


Edition: Livre de poche
Pages: 416
Date de parution: 1879

Mon avis:


Veuve depuis son arrivée récente sur Paris, Hélène Grandjean élève seule sa fille Jeanne, enfant maladive âgée de onze ans, qui voue à sa mère un amour absolu et exclusif. Sortant peu pour ménager la santé délicate de sa fille, ses journées s'égrènent dans le calme, rythmées par ses travaux de couture, la contemplation de Paris et  les visites hebdomadaires des rares amis qu'elle a pu rencontrer. Lors d'une crise de sa fille, Hélène fait la connaissance du Docteur Henri Deberle, homme marié et père d'un petit garçon. Cette rencontre les bouleverse tous deux et ils découvrent un sentiment jusque là méconnu: la passion. Elle s'ouvre petit à petit au monde qui l'entoure et rend quotidiennement visite à la famille Deberle. 
L'amour qui unit Henri et Hélène n'est partagé que par d'intenses conversations, des échanges de regard et des effleurements. Des moments intimes et connus d'eux seuls qui leur offrent une douce quiétude.

"Alors, les relations se nouèrent plus étroitement encore, une vie charmante commença. Pour Hélène, c'était comme si Henri n'avait jamais cédé à une minute de folie; elle avait rêvé cela; ils s'aimaient mais ne se le diraient plus, ils se contenteraient de le savoir. Heures délicieuses pendant lesquelles, sans parler de leur tendresse, ils s'en entretenaient continuellement, par un geste, par une inflexion de voix, par un silence même. Tout les ramenait à cet amour, tout les baignait dans une passion qu'ils emportaient avec eux, autour d'eux, comme le seul air où ils pussent vivre."

Mais lorsque Jeanne perçoit le lien qui les unit, elle se montre jalouse et tentera par tous les moyens de les séparer.

Quelle belle et bouleversante histoire que celle d'Hélène. 
J'ai beaucoup aimé son personnage, cette femme du 19e siècle, honnête et droite, mère dévouée qui voit son quotidien bouleversé par la passion qu'elle ressent pour un homme marié. Ces sentiments vont s'insinuer dans sa vie sage et rangée, un moment suspendu dans le temps, une page d'amour. C'est un magnifique portrait de femme, partagée entre sa maternité, le respect des conventions morales de l'époque et les sentiments qui animent son cœur de femme, 
Ce qui rend cette histoire si troublante, c'est le personnage de Jeanne, très complexe. Sa maladie nous bouleverse  et on retrouve parfois chez elle l’innocence propre aux enfants de son âge mais l'amour destructeur qu'elle voue à sa mère est dérangeant. Elle se comporte souvent en tyran à l'égard d'Hélène. On perçoit tout le temps sa présence, oppressante, elle en ferait presque peur.

"Et elle vit Jeanne, la face toute pâle, qui les regardait, de ses yeux grandis, d'un noire d'encre. L'enfant n'avait pas bougé, le menton dans la plume, serrant toujours l'oreiller dans ses petits bras. Elle venait seulement d'ouvrir les yeux, et elle les regardait.
- Jeanne, qu'as tu? demanda Hélène. Es-tu malade? Veux-tu quelque chose?
Elle ne répondait pas, elle ne bougeait pas, n'abaissait même pas les paupières, avec ses grands yeux fixes, d'où sortait une flamme. L'ombre farouche était descendue sur son front, ses joues blêmissaient et se creusaient. Déjà elle renversait les poignets, comme à l'approche d'une crise de convulsions."

Enfin, Zola ne serait pas Zola sans les longues pages où il plante le décor. De longues descriptions évoquent ce Paris, animé, qui s'agite sous les fenêtres de l'appartement d'Hélène.

Ce livre est le 8e tome de la série des Rougon-Macquart. Je l'ai lu indépendamment des autres sans avoir l'intention de relire toute la série.  Je ne peux donc le comparer aux autres œuvres que j'ai lu au collège ou au lycée et dont je n'ai gardé qu'un souvenir lointain. Alors certes, les digressions de Zola sur les personnages secondaires m'ont parfois impatientées. Néanmoins, j'ai trouvé son écriture très cinématographique, le décor est décrit avec une telle précision qu'il s'anime sous nos yeux. L'amour et la passion sont superbement bien retranscrits et ces mots ont fait vibrer ma petite fleur bleue.





Challenge des douze thèmes: "Coeurs sur toi" Et si on lisait une romance?
Coupe des 4 maisons: Relique de l'amour, livre avec un triangle amoureux (15 points)

3 commentaires:

  1. Une Page d'Amour est une histoire tragique, mais qui n'en est pas moins prenante. Personnellement, j'ai aimé la façon dont Zola aborde cette histoire, avec un triangle amoureux vraiment atypique et un peu dérangeant mais, en même temps, qui fonctionne. Ah là là, tu me donnes envie de me replonger dans ce roman un de ces jours, tiens. ^^ Contente de voir que cette lecture t'a plu !

    Tu penses retenter le coup et lire d'autres tomes des Rougon-Macquart ? ;)

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  2. Pas tout de suite, mais je n'ai rien contre !

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    1. Oui, je te comprends, en général, quand on sort d'un bouquin comme celui-là, on a envie de faire une pause. Je me souviens avoir enchaîné les Rougon-Macquart au lycée, je me demande encore comment j'avais fait... :D Je lisais moins à l'époque mais ce serait maintenant, j'espacerais sans nul doute mes lectures. Ce sont des livres qui demandent du temps pour être digérés. J'espère que tu aimeras les autres. ;)

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